Et son camarade Pierre-Yves Maillard de dresser immédiatement la comparaison avec les 800 millions par an que devrait rapporter le relèvement de l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans: «Il y a une forme de raffinement dans l’injustice sociale. On juge indispensable de faire travailler les femmes de ce pays un an de plus pour distribuer ces recettes en cadeaux fiscaux aux investisseurs étrangers.»

6. Voici la calculette des partisans

Les partisans de la réforme font d’autres opérations sur leur calculette. «L’erreur assez classique de la gauche, c’est qu’elle a une vision statique des recettes fiscales, alors qu’il faut en avoir une vision dynamique», objecte Olivier Feller.

Le rapatriement espéré du marché des obligations en Suisse devrait entraîner de nouvelles recettes fiscales. Et là, les partisans citent un rapport de l’Administration fédérale des contributions de décembre dernier: «Dans le cas le plus favorable, la réforme pourrait être autofinancée dès l’année de son entrée en vigueur.» Suivant cette dynamique, cela pourrait entraîner 350 millions de francs de recettes supplémentaires au bout de cinq ans et même 490 millions au bout de dix ans.

A cela, les partisans ajoutent encore les 200 millions d’économies que pourraient faire les collectivités publiques sur les obligations qu’elles émettent grâce à des taux d’intérêt plus bas.

7. Qui a raison et qui a tort?

Là où on pourrait donner raison à chacun des deux camps, c’est que l’évolution des taux hypothécaires et celle du marché des obligations en Suisse sont les deux facteurs qui auront le plus d’influence sur les recettes fiscales dans ce domaine. Pour le reste, à chacun de se faire son opinion entre ses deux estimations, entre l’espoir de 500 millions de recettes supplémentaires ou la crainte de 800 millions de pertes. Et en fin de compte, en Suisse, c’est toujours le camp qui obtient plus de 50% des voix qui a raison…

Enième round gauche-droite

Lorsque droite et gauche s’affrontent devant le peuple sur la fiscalité, c’est souvent la seconde qui l’emporte.

La fiscalité est l’un des terrains de jeu privilégiés pour les grandes batailles politiques entre la gauche et la droite. Et bien que minoritaire, sur ce terrain, c’est en général la gauche qui l’emporte, ou du moins arrive-t-elle, lorsqu’elle lance un référendum, à bloquer les réformes de droite devant le peuple. La gauche a moins de succès, en revanche, sur ses propres projets fiscaux, avec comme dernier échec en date l’an dernier l’initiative dite des 99%, qui voulait taxer davantage les revenus du capital (64,9% de non).

La dernière victoire fiscale de la gauche est encore toute fraîche. En février de cette année, le peuple suisse refusait largement (62,7% de non) la suppression du droit de timbre d’émission. Il y a deux ans, le score était fort semblable (63,2% de non) lors du vote sur le relèvement des déductions fiscales pour les frais de garde des enfants.

La principale victoire de la gauche dans ce domaine remonte toutefois à cinq ans, avec le rejet de la troisième réforme de la fiscalité des entreprises (RIE III), sur un score assez proche (59,1% de non). Deux ans plus tard, le peuple soutenait massivement (66,4% de oui) un paquet fiscal comprenant une version revisitée de cette réforme et un financement additionnel pour l’AVS. Il s’agissait là toutefois d’un projet de compromis entre la droite et la gauche.

Pour trouver le dernier combat gauche-droite devant le peuple qui a tourné à l’avantage de la droite, il faut remonter à 2008, avec l’acceptation du bout des lèvres de la deuxième réforme de la fiscalité des entreprises (50,5% de oui, 20 000 voix d’écart).

Quelle que soit l’issue du scrutin le 25 septembre, les prochaines grandes batailles fiscales s’annoncent différentes. Sous la pression internationale, la Suisse est en train de revoir sa fiscalité des entreprises, dans le but d’imposer un taux minimal de 15% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse les 750 millions de francs. Cette réforme n’est pas contestée, mais droite et gauche se déchirent sur la répartition de la manne, et sur d’éventuelles compensations.

Un autre grand projet fiscal vise l’imposition individuelle des couples. Le Conseil fédéral devrait présenter un projet cet automne et, sous l’impulsion des femmes PLR, une initiative populaire a déjà recueilli plus de 100 000 signatures. Là, on a affaire à une autre configuration avec une opposition entre un camp réformiste, qui regroupe PLR et gauche, face à un camp conservateur, formé de l’UDC et du Centre. PhC

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