Les paires Noël - Pour cette série des fêtes, La Liberté a réuni deux protagonistes de la scène sportive que les disciplines séparent, mais qui ont un point commun et les a invités à dialoguer. Aujourd’hui, Thibaut Petit, entraîneur du Fribourg Olympic, échange avec Christian Dubé, coach de Fribourg-Gottéron. Episode 4/6.

Réunir Thibaut Petit et Christian Dubé, les entraîneurs des deux clubs les plus emblématiques du canton, c’est l’assurance de ne pas s’ennuyer. Sérieux durant les matches, le Belge (43 ans) et le Canadien (46 ans) ont la langue bien pendue et plaisantent volontiers en-dehors. S’il leur arrive de se croiser au Sport Café, le restaurant de la patinoire, les deux hommes ne s’étaient encore jamais attablés pour parler de leur métier. Tous deux pères de deux garçons adolescents, Thibaut Petit et Christian Dubé partagent plusieurs autres points communs. Notamment celui d’avoir eu un papa qui les a emmenés dans un vestiaire dès leur plus jeune âge.

Comment épouse-t-on le métier d’entraîneur?

Thibaut Petit (TP): Je suis né dans un vestiaire, avec mon papa qui occupait un rôle médical dans une équipe. J’ai tout de suite été attiré par ce travail de coach. J’ai commencé par jouer, mais j’ai dû vite m’arrêter et très rapidement, j’ai été passionné par le coaching.

«Le coach est plus un psychologue qu’autre chose»
Christian Dubé

Christian Dubé (CD): Je suis aussi né dans un vestiaire, puisque mon père jouait, puis coachait. Mais pour être honnête, je ne me suis jamais vu comme coach. Je me voyais plus comme agent ou comme manager. Après, tout le monde connaît l’histoire, je me suis retrouvé derrière le banc après avoir viré notre entraîneur (Mark French en 2019, ndlr). J’imaginais rester deux semaines, le temps de trouver un autre coach. Les résultats ont suivi, puis on m’a dit: «Pourquoi tu ne resterais pas?» Et cinq ans plus tard, je suis encore là…

Enfants, quelle image aviez-vous du coach?

TP: L’image d’un référent, quelqu’un qui dégage beaucoup de valeurs et qui doit aller chercher la confiance de ses joueurs. Il y a la vie du terrain, mais pas que. Je voyais ces coaches très actifs et très intéressés par ce qui se passe autour.

Episode (2/6): Laura Mauricio et Julien Staudenmann: pas le même maillot, mais la même passion

CD: J’ai eu l’exemple de mon père. C’était un leader, une personne autoritaire aussi, que les joueurs se devaient de respecter. Les choses ont beaucoup changé par rapport aux années 1980. Aujourd’hui, tu es plus un psychologue qu’autre chose.

La gestion est primordiale. Il faut que les joueurs adhèrent à votre projet?

TP: Il faut un fil rouge et le garder. La partie management est beaucoup plus importante aujourd’hui que la tactique ou les connaissances du jeu. Quand j’étais jeune joueur, j’avais un coach qui pouvait m’insulter ou je ne sais quoi, je disais merci et j’en faisais deux fois plus.

CD: C’est exactement ça. Quand tu dis à la nouvelle génération d’aller à gauche, elle demande pourquoi elle ne peut pas aller à droite. Aujourd’hui, tout prend plus de temps, mais c’est important d’inclure les joueurs dans ces discussions.

Avez-vous beaucoup évolué depuis vos débuts?

Nom

Thibaut Petit

Naissance

Le 9 mars 1980 à Liège (Bel)

Famille

Fils d’Alain Petit, kinésithérapeute au Spirou Charleroi. Marié et papa de deux garçons

Parcours

A 20 ans, une blessure le contraint à arrêter le basket. Il devient alors entraîneur-assistant de Huy. En 2006, il vient une première fois entraîner en Suisse à Université Neuchâtel, puis à Monthey. Il revient en 2017 pour diriger Lugano. Il a coaché plusieurs équipes européennes comme Arras (Fra), Braine (Bel), Montpellier (Fra) et Koursk (Rus) avant de reprendre Fribourg Olympic l’été passé.

Palmarès

A été champion de Suisse et de Belgique, et multiple vainqueur de la Coupe de France et de Belgique

TP: Entre 2004 et aujourd’hui, c’est totalement différent. Mais j’ai eu la chance de passer par le basket féminin. Le management n’est pas le même. Les filles étaient plus dans la réflexion. Elles voulaient comprendre. Depuis des années, j’essaie donc de faire valider le projet par le groupe, car il faut qu’on soit dans le même bateau.

CD: Tu vois, ça, c’est les femmes, elles veulent tout le temps savoir ce qui se passe! (rires)

Qu’est-ce qui vous plaît tant dans ce travail?

CD: Tu es au bord de la glace. Tu vis des émotions, tu prends des décisions. Ce sont les montagnes russes! J’ai vécu l’autre job (directeur sportif, ndlr). C’est difficile. Tu es dans les gradins, et tu ne peux pas faire grand-chose.

TP: On a besoin de cette adrénaline, même si avant chaque match, je me demande pourquoi je fais ça.

CD: Après les défaites aussi! (rires)

TP: Oui, mais j’ai besoin de ces sensations. On ne peut pas tricher dans ce métier. Quand on n’a plus le feu, il faut s’arrêter.

Et ce que vous n’aimez pas?

CD: Les critiques des gens. Ça fait partie du sport, mais je trouve dur certains commentaires blessants. Les joueurs sont des humains, pas juste des morceaux de viande. Ils donnent leur maximum.

TP: J’ai travaillé dans beaucoup d’endroits où on ne parlait pas le français, donc je ne comprenais pas tout! (rires) Le plus dur pour moi, c’est l’éloignement de ma famille. Avec des contrats de 1 ou 2 ans, mon métier ne me permet pas d’emmener ma famille donc je voyage seul. Quand j’étais en Russie, je ne l’ai vue que 9 jours en 1 an. Si ça se passe bien ici à Fribourg, j’ai envie de la faire venir l’année prochaine, car cela fait 8 ans que je vis sans elle…

Comment percevez-vous l’équipe voisine?

CD: Olympic fait de l’excellent travail. Il connaît beaucoup de succès. Je suis un peu jaloux, car nous, nous n’avons rien gagné. J’aimerais bien me battre pour un titre chaque année. Ce n’est pas le cas, mais on y travaille.

TP: Je suis admiratif du travail réalisé, car il y a beaucoup de plus de joueurs à gérer. En hockey, tout est plus grand. C’est un sport de vitesse que j’adore, même si je n’y comprends rien…

«On ne peut pas tricher dans ce métier»
Thibaut Petit

CD: T’inquiète, certains de mes joueurs ne comprennent rien non plus! (rires)

TP: Je suis pris par ce jeu, alors que je viens pourtant d’un pays de foot. J’aime cette équipe de Gottéron qui ne lâche jamais.

Qu’est-ce qu’un joueur facile à coacher?

CD: Gunderson! Il est pro de A à Z. Tu n’as pas besoin de le gérer. Je n’ai jamais eu un problème en six ans avec lui. Pas un!

TP: Un joueur qui savoure, qui aime venir à la salle, qui ne triche pas.

CD: Après, il nous faut aussi quelques joueurs qui nous challengent un peu.

TP: Oui, il ne faut pas 10 moutons! Avoir un ou deux joueurs capables de péter un câble, cela peut aider l’équipe, car ils le feront aussi en match.

Quelle relation entretenez-vous avec les arbitres?

Nom

Christian Dubé

Naissance

Le 25 avril 1977 à Sherbrooke (Can)

Famille

Fils de Normand Dubé, ancien joueur professionnel, qui a terminé sa carrière à Sierre. Marié et papa de deux garçons

Parcours

Drafté par les New York Rangers en 1995, il a disputé 36 matches de NHL avant de venir en Suisse, où il a joué avec Lugano, Berne et Fribourg-Gottéron. En 2015, il a mis un terme à sa carrière et occupe aujourd’hui le poste d’entraîneur et de directeur sportif de Fribourg-Gottéron.

Palmarès

Double champion du monde juniors avec le Canada, il a remporté deux titres de champion de Suisse avec Berne

CD: Je les respecte énormément parce qu’ils ont un job difficile, mais… c’est difficile lors de certains matches. Le hockey va plus vite qu’avant, il y a davantage de règles, mais je trouve des fois que ça ne suit pas.

TP: J’ai beaucoup changé. Il y a quelques années, il m’est arrivé de me faire expulser. Je pense aussi avoir perdu des matches en me focalisant trop sur l’arbitrage, mais j’ai appris qu’on ne maîtrise pas ça. J’ai donc arrêté de perdre de l’énergie avec les arbitres. Je préfère me concentrer sur mon équipe.

Avez-vous des grigris ou des habitudes particulières avant les matches?

CD: Je vais tout le temps dans le sauna pour penser à mon speech d’avant-match.

TP: J’en avais beaucoup à l’époque, mais avec l’âge, je n’en ai plus. Il n’y a plus rien qui marche! (rires) J’ai juste une petite play-list dans ma douche le jour du match. Et je le vis beaucoup mieux!

Quel cadeau aimeriez-vous recevoir?

Thibaut Petit (TP): Un trophée pour être sûr de jouer une Coupe d’Europe la saison prochaine.

Christian Dubé (CD): Trente points de plus, comme ça, j’accède directement aux play-off!

Quelle bonne résolution n’allez-vous pas prendre pour 2024?

TP: Arrêter de faire des bons restos.

CD: Me laisser aller un petit peu au niveau de la nourriture.

Quel petit gueuleton choisissez-vous pour le réveillon?

TP: Une fondue bourguignonne! CD: Purée, c’est lourd ça! TP: Non, c’est parfait! (rires)

CD: Une pizza maison viande séchée-truffes. J’adore!

Quelle est l’image que vous retenez de 2023?

TP: La guerre. Venant de Russie, j’ai été marqué par ça. Et puis, Israël… Le quotidien me choque aujourd’hui.

CD: Je ne sais pas où on va. Je suis dans un mode «Profiter de la vie» parce qu’on ne sait pas combien de temps on va vivre.

A qui balanceriez-vous une boule de neige?

TP: Peut-être à un de mes fils, comme on va skier pour la première fois, je peux imaginer qu’il y aura une petite bataille de boules de neige!

CD: A Gerd Zenhäusern. On aime bien s’emmerder les deux. On est comme deux frères! FR

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Thibaut Petit et Christian Dubé partagent leur passion pour le coaching

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